Données migratoires pertinentes pour la pandémie de la COVID-19
Les migrants – en particulier ceux qui occupent des emplois à faible revenu – peuvent être à la fois plus touchés par, et plus vulnérables à la propagation de la COVID-19 dans les pays déjà frappés par la pandémie et ceux où elle progresse. Mais, ils peuvent aussi jouer un rôle important dans la réponse à la COVID-19 en travaillant dans les secteurs essentiels. Au 1 mars 2021,les émigrants des 20 pays comptant le plus grand nombre de cas de COVID-19 représentaient 31% de la population de migrants internationaux et ils avaient envoyé environ 37% de tous les envois de fonds dans le monde vers leur pays d'origine en 2019 (analyse du CMADM fondée sur les documents DAES, 2021 ; La Banque mondial, 2020a ; OMS, 2021)1. Les migrants représentaient au moins 3,7 % de la population dans quatorze des 20 pays comptant le plus grand nombre de cas de COVID-19 et plus de 7 % dans huit de ces pays (analyse du CMADM fondée sur les documents DAES, 2021 ; OMS, 2021). Les migrants internationaux sont surreprésentés dans ces pays par rapport à la proportion mondiale des migrants internationaux, qui est de 3,6 % de la population totale.
Les restrictions croissantes aux frontières ont aussi une incidence sur la mobilité des migrants et le rôle des organisations humanitaires. Entre le 11 mars 2020, date à laquelle l’OMS a officiellement déclaré que la COVID-19 peut-être qualifié de pandémie, et le 22 février 2021, près de 105 000 restrictions de mouvement ont été mises en place dans le monde (OIM, 2021a). En même temps, 189 pays, territoires ou régions ont émis 795 exceptions à ces restrictions, permettant ainsi une mobilité (ibid.). Les premières estimations avec une hypothèse de croissance nulle du nombre de migrants entre le 1er mars et le 1er juillet 2020, suggèrent une diminution de près de 2 millions de migrants internationaux dans le monde par rapport à l'estimation initialement attendue entre mi-2019 et mi-2020 (DAES, 2020). On estime que les flux migratoires vers les pays de l'OCDE - mesurés par le nombre de nouveaux permis délivrés - ont diminué de 46% au premier semestre 2020, et 2020 devrait être un creux historique pour les migrations vers les pays de l'OCDE (OCDE, 2020a). Une telle baisse des flux migratoires peut également avoir des effets démographiques sur les pays qui dépendent de la migration pour la croissance démographique. Par exemple, les estimations pour 2020 suggèrent que la population de l'Allemagne n'a pas augmenté pour la première fois au cours de la dernière décennie en raison d'une baisse de l'immigration (Office fédéral allemand des statistiques, 2021). En Australie, la migration nette pour 2020/2021 devrait être négative pour la première fois depuis 1945, ce qui entraînera la croissance démographique la plus faible depuis un siècle (Australian Centre for Population, 2020).
Cette page traite des données relatives aux migrants qui peuvent aider à comprendre la manière dont ces derniers peuvent être à la fois touchés par les conséquences de la COVID-19 et faire partie de la réponse à la pandémie. Concernant l’évolution constante des informations liées à la pandémie du COVID-19, les chiffres et autres données seront régulièrement actualisés. Pour des informations par pays ou région, veuillez voir ici et sous la carte pour les principaux indicateurs sur la migration et la démographie. Pour connaître les principales tendances par région sur l'impact de la COVID-19, veuillez consulter nos aperçus de données régionales.
Tendances de la migration
Par thème
Taux d'infection et de mortalité chez les migrants
Les travailleurs migrants peu qualifiés hébergés dans des dortoirs surpeuplés ont été touchés de manière disproportionnée par la pandémie. Les exemples de l’Arabie saoudite et de Singapour, où les Ministères de la Santé ont fourni des données officielles sur le statut migratoire des personnes ayant été testées positives, montrent la différence d’exposition au virus de la population migrante. D’après le Ministère Saoudien de la Santé, 75 % de tous les nouveaux cas confirmés au 7 mai 2020 se trouvaient parmi les migrants. Plus de 95 % des cas confirmés au Singapour au 19 juin 2020 étaient des migrants, et plus de 93 % du nombre total de cas étaient la conséquence du surpeuplement dans les dortoirs des migrants (Ministère de la Santé de Singapour, 2021). Malgré une tendance à la baisse du nombre de nouveaux cas, au 1 mars 2021, les résidents des dortoirs représentaient près de 91% du nombre cumulé de cas au Singapour (ibid).
Les migrants internationaux étant un groupe très hétérogène, les effets sur leur santé sont également variés. Une revue systématique rapide des publications a révélé que les taux d'incidence parmi les migrants et les personnes déplacées de force semblent être systématiquement plus élevés que parmi les groupes de non-migrants (Hintermeier et al., 2020). Cependant, toutes les études incluses dans cette revue portaient sur les migrants et les personnes déplacées de force qui étaient plus à risque d'être infectées en raison de leurs conditions de vie et de travail (ibid). Une autre revue de la littérature évaluée par des pairs, des ensembles de données nationaux et de la littérature grise par Hayward et al. (2020) démontre également que les migrants dans les pays à revenu élevé courent un risque accru d'infection et de décès dus au COVID-19. Outre les conditions de vie et de travail des migrants, l’étude attribue également cette représentation disproportionnée des migrants à un accès limité aux soins de santé (ibid) (voir la section sur la gouvernance des migrations). Même si les taux d'incidence de la COVID-19 sont plus élevés chez les migrants dans plusieurs pays, la comparaison des données est également difficile en raison des différences nationales en matière de démographie et de collecte de données (Laczko, 2021).
Selon les estimations, on comptait 164 millions de travailleurs migrants dans le monde en 2017 (OIT, 2018). Les travailleurs migrants représentaient respectivement 20,6 % et 17,8 % de tous les travailleurs en Amérique du Nord et en Europe occidentale, du Sud et du Nord (ibid.). Ils représentent donc environ un travailleur sur cinq dans ces pays et peuvent être parmi les premiers à être touchés par les licenciements, tandis que les restrictions de mouvement et le confinement ont des répercussions sur leurs moyens de subsistance, comme l’arrêt de son activité. Les conditions de vie dans les logements surpeuplés constituent un risque particulier de propagation de la COVID-19 parmi les travailleurs migrants.
Quel que soit le lieu où ils travaillent, les migrants contribuent fortement à lutter contre la pandémie mais risquent aussi d’avantage de contracter le virus. À titre d’illustration, sur les 15 pays les plus touchés par la COVID-19 au 1 mars 2021, les données internationales disponibles indiquent qu’au moins 8 pays – États-Unis, Royaume-Uni, France, Espagne, Italie, Allemagne, Tchéquie – dépendent de travailleurs nés à l’étranger dans le secteur crucial des services de santé (OCDE, 2019). À l'extrémité supérieure, 33% des médecins et 22% des infirmières au Royaume-Uni en 2015/6 étaient nés à l'étranger. (ibid.).
En même temps, il existe une pénurie mondiale de personnel soignant depuis de nombreuses années et la demande de personnel de santé qualifié est probablement exacerbée par la pandémie actuelle. Les pays d’origine de migrants qualifiés, en particulier, connaissent des pénuries dans le secteur de la santé, qui ne sont toutefois pas uniquement dues à l’émigration de travailleurs. Au Royaume-Uni et aux États-Unis, 29% et 25% de médecins ont été formés à l'étranger (OCDE, 2020b). Aux États-Unis comme au Royaume-Uni, en 2016, la majorité de médecins formés à l’étranger avaient suivi leurs études en Inde et au Pakistan. De plus, de nombreux médecins américains formés à l’étranger ont étudié dans les îles des Caraïbes, aux Philippines, au Mexique et au Canada, tandis que nombre de ceux qui pratiquent au Royaume-Uni ont étudié au Nigéria, en Égypte, en Irlande, en Grèce et en Afrique du Sud (OCDE, 2019).
Les migrants représentent une proportion importante des personnes actives dans les secteurs essentiels et dans ceux qui sont les plus touchés par la crise. Par exemple, plus de 13 % de toutes les personnes travaillant dans les services et la vente dans sept des 15 pays ayant le plus grand nombre de cas de COVID-19 étaient nées à l’étranger. En outre, les données disponibles montrent que plus de 9 % de tous les travailleurs qualifiés dans les secteurs de l’agriculture, de la foresterie ou de la pêche dans cinq de ces pays étaient nés à l’étranger (analyse du CMADM basée sur le document OCDE DIOC, 2015/16). En moyenne, 13% de tous les travailleurs clés de l'Union européenne (UE) sont des immigrants (Fasani et Mazza, 2020). En 2017, les États-Unis ont recruté 161 583 travailleurs étrangers, auxquels ils ont octroyé un permis de travail saisonnier (OCDE, 2019) et les travailleurs saisonniers dans les pays de l'UE sont souvent sous-dénombrés. Selon les estimations, 69% de tous les migrants aux États-Unis travaillent dans des secteurs d'infrastructures essentielles (Center for Migration Studies, 2020, d'après les données du US Census Bureau de 2018). Dans la plupart des pays de l’OCDE fortement touchés par la crise, entre trois et cinq travailleurs nés à l’étranger sur sept sont des femmes dans les secteurs des services et de la vente (analyse du CMADM fondée sur le document OECD DIOC, 2015/16). Les confinements imposés dans de nombreux pays peuvent avoir des conséquences disproportionnées sur le statut socio-économique des femmes migrantes, qui sont surreprésentées dans ces secteurs.
Pays |
% de travailleurs nés à l’étranger parmi tous les travailleurs actifs dans les services et la vente, 2015/16 |
% de femmes parmi les travailleurs nés à l’étranger actifs dans les services et la vente, 2015/16 |
% de travailleurs nés à l’étranger parmi les travailleurs qualifiés dans les secteurs de l’agriculture, de la foresterie et de la pêche, 2015/16 |
% de femmes parmi les travailleurs qualifiés nés à l’étranger dans les secteurs de l’agriculture, de la foresterie et de la pêche, 2015/16 |
États-Unis a |
23.3 |
78.8 |
46.3 |
27.2 |
Espagne |
19.5 |
58.9 |
11.3 |
5.3 |
Italie |
19.0 |
72.3 |
11.0 |
16.8 |
Allemagne |
18.4 |
58.8 |
9.6 |
11.7 |
Belgique c |
17.1 |
- |
5.8 |
- |
Royaume-Uni b |
13.8 |
11.0 |
16.8 |
78.5 |
France |
13.8 |
59.5 |
6.7 |
26.1 |
Pologne b |
0.9 |
42.2 |
0.4 |
52.3 |
Mexique b |
0.6 |
41.5 |
0.3 |
11.3 |
Source : Analyse du CMADM fondée sur le document de l’OCDE DIOC, 2015/16
a Les données relatives aux professions sont codées avec les codes américains de classification type des professions et ne sont donc pas directement comparables aux données pour les autres pays dans le tableau ci-dessus, qui sont codées avec les codes de la CITP-08.
b Les données étant ventilées par personne née à l’étranger, personne née dans le pays et personne dont le pays natal est inconnu, les pourcentages indiqués peuvent être sous-estimés.
c Les données pour la Belgique ne sont pas ventilées par sexe
On estimait à 11,5 millions le nombre de travailleurs domestiques migrants dans le monde en 2013, dont environ 8,5 millions de femmes (OIT, 2015). En cette période où sévit la COVID 19, leur employeur peut être infecté et peut leur transmettre la maladie, ou peut décéder, si bien que le travailleur peut perdre sa source de revenu puisque le permis de travail est souvent lié à l’employeur. Avec la fermeture des frontières, il leur est souvent impossible de rentrer dans leur pays d’origine, et les travailleurs domestiques migrants se trouvent alors pris au piège dans leur pays de destination, sans logement ni revenu.
Dans les pays de l’OCDE, la proportion des travailleurs immigrés vivant dans la pauvreté – bien qu’étant employés – était la plus élevée dans les pays de l’Europe du Sud et aux États-Unis en 2017/2018. Le taux de pauvreté des travailleurs était respectivement de 32,1 % et 24,8 % en Espagne et aux États-Unis en 2018, et de 29,1 % en Italie en 2017 (OCDE, 2019b). Ces migrants peuvent être touchés de manière disproportionnée pendant la crise de la COVID-19 lorsque le taux de chômage des citoyens augmente lui aussi mais que les mesures prises pour en atténuer les effets ne les incluent pas
Selon les estimations, 37 % de tous les rapatriements de fonds effectués dans le monde en 2019 ainsi qu'en 2020 ont été reçus dans les 20 pays qui comptent le plus grand nombre de cas de la COVID-19 confirmés au 1 mars 2021 (analyse du CMADM basée sur le document Banque mondiale, 2020). À l’échelle mondiale, sept des 20 pays les plus touchés par la COVID-19 – les États-Unis , Inde, la Fédération de Russie, le Royaume-Uni, la France, l’Italie et l’Allemagne – figuraient parmi les 20 pays à partir desquels les rapatriements de fonds les plus importants ont été effectués en 2019. Les fonds rapatriés depuis ces sept pays ont représenté plus de 25 % de tous les rapatriements de fonds reçus dans le monde en 2018 (ibid.). Ensemble, les États-Unis, les pays de la zone européenne, le Royaume-Uni et le Canada ont été à l’origine de 46 % des fonds rapatriés vers des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire en 2019, selon les estimations (Banque mondiale, 2019).
Les pays producteurs de pétrole du Conseil de coopération du golfe (CCG) sont une destination importante pour les migrants d’Asie du Sud et d’Afrique de l’Est. Comme de nombreux travailleurs migrants internationaux des États du CCG sont rentrés dans leur pays d’origine (voir la section sur la migration de retour ci-dessous) ou ne peuvent plus voyager pour travailler à cause des confinements, ils ne peuvent plus envoyer de fonds à leur famille. Étant donné qu'une personne sur neuf dans le monde dépend des envois de fonds effectués par les travailleurs migrants, la COVID-19 aura un impact sur les familles et les communautés de migrants en termes de nutrition, de santé, d'éducation et de revenus soutenus par les envois de fonds, ce qui à son tour peut entraîner des revers potentiels sur les progrès réalisés sur plusieurs ODD des Nations Unies. Il convient cependant de noter que les envois de fonds sont des fonds privés et ne peuvent pas remplacer l'aide publique au développement et d'autres dépenses publiques.
Avant le début de la crise de la COVID-19, selon les projections de la Banque mondiale (2019), 574 milliards de dollars américains devaient être envoyés dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire d’ici la fin 2020, mais les pertes d’emploi et les problèmes liés aux rapatriements de fonds pendant les confinements auront de graves répercussions sur les bénéficiaires qui dépendent de ces fonds pour leur stabilité financière. En avril 2020, Ratha et al. (2020a) ont estimé que les envois de fonds vers les pays à revenu faible et intermédiaire chuteraient à 445 milliards de dollars américains en 2020, soit une baisse de 20% par rapport à 2019. En octobre 2020, Ratha et al. (2020b) ont ajusté leur baisse prévue pour les pays à revenu faible et intermédiaire à 508 milliards de dollars américains en 2020 et une nouvelle baisse à 470 milliards de dollars américains en 2021.
Les données récentes des pays qui sont les principaux destinataires des envois de fonds suggèrent une tendance plus nuancée. Après une première baisse au premier semestre 2020 (principalement en mars et avril), les envois de fonds semblent avoir rebondi à des taux pré-COVID-19 et à des sommets historiques dans plusieurs pays. Par exemple, le Pakistan - où les envois de fonds représentaient près de 8% du PIB en 2019 - a enregistré le montant le plus élevé des envois de fonds mensuels en juillet 2020 (Banque d'État du Pakistan, 2020). Dans des pays comme le Mexique et le Népal, les envois de fonds mensuels au cours des deuxième, troisième et quatrième trimestres de 2020 ont augmenté pour atteindre des montants plus élevés que l'année précédente pour la même période. Plusieurs facteurs pourraient être à l'origine de cette tendance : les fluctuations monétaires associées à l'effet des pays sortant de confinements stricts - pendant lesquels les dépenses habituelles des ménages étaient limitées et l'épargne plus élevée - ont peut-être joué un rôle important dans la baisse et le rebond. Les économies émergentes ont été confrontées à une forte dépréciation de leur devise en février-mars 2020, alors que les devises des économies avancées étaient généralement fortes au cours de la même période. Cela peut avoir conduit à la conversion du montant habituel des envois de fonds envoyés en montants plus élevés dans les pays de destination. Le comportement financier des migrants en période de crise pourrait également être un facteur, les migrants envoyant des économies de confinements a pour soutenir leurs familles dans les pays fortement touchés par la pandémie de la COVID-19, mais aussi vice versa, les familles soutenant les migrants dans les pays touchés. En outre, les migrants qui sont rentrés dans leur pays d'origine peuvent également avoir transféré leurs économies par les canaux officiels avant de revenir.
Migrants bloqués et migration de retour
En raison des restrictions de voyage et de la fermeture des frontières imposées par les gouvernements du monde entier, plusieurs migrants - y compris des travailleurs saisonniers et des étudiants internationaux - ont été bloqués et n'ont pas pu rentrer dans leur pays d'origine. Au 13 juillet 2020, le groupe de travail de l'OIM sur les retours avait identifié au moins 3 millions de migrants bloqués (OIM, 2020). Parmi ceux-ci, plus de 1,2 million de migrants étaient bloqués dans la région de l'OIM au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (ibid.).
Les migrants perdant leur emploi et risquant davantage d’être infectés à cause des conditions de surpeuplement dans lesquelles ils vivent souvent, de nombreux travailleurs rentrent dans leur pays d’origine, souvent grâce à des négociations bilatérales qui autorisent l’ouverture temporaire des frontières pour permettre le retour des migrants en détresse. À l’échelle mondiale, l’Inde est le pays d’origine qui compte le plus grand nombre d’émigrants (DAES, 2020) et au 27 février 2021, l’opération de rapatriement officielle de l’Inde avait facilité le retour de plus de 4,5 millions d’Indiens depuis le monde entier (Ministère indien de l’aviation civile, 2021). Près de 932 000 Afghans dépourvus de documents sont rentrés d'Iran et du Pakistan entre le 1er mars 2020 et le 25 février 2021. Sur ce nombre, 117 145 Afghans étaient rentrés au cours des deux premières semaines de mars 2020 seulement (OIM, 2021b). Au 30 octobre 2020, plus de 136 000 migrants et réfugiés Vénézuéliens étaient rentrés à la République bolivarienne du Venezuela en provenance d'autres pays de la région (OIM et UN OCHA, 2020). À son apogée, 600 Vénézuéliens sont rentrés chaque jour de Colombie et 88 Vénézuéliens sont rentrés quotidiennement du Brésil via la frontière à Pacaraima (Réponse pour les Vénézuéliens, 2020). Entre le 1er avril 2020 et le 25 février 2021, l'OIM a aidé plus de 54 000 migrants qui se trouvaient dans des installations de quarantaine après leur retour en Éthiopie depuis les pays africains voisins et l'Arabie saoudite (OIM, 2021c).
La migration – tant interne qu’internationale – est à l’origine de l’essentiel de l’augmentation de la population urbaine (OIM, 2015) (voir la partie ci-dessous sur l’urbanisation pour plus de détails sur la migration internationale vers les zones urbaines). Souvent, le manque d’infrastructures dans les pays du Sud a conduit à l’exclusion des migrants internes à l’accès à plusieurs services, dont les soins de santé (ibid.). Entre le 13 mars 2020 et le 28 janvier 2021, les restrictions à la mobilité interne dans les pays du monde entier ont eu des répercussions sur les personnes voyageant régulièrement et les nationaux dans respectivement 61 % et 59 % des points de transit internes évalués par la Matrice de suivi des déplacements de l’OIM (2021d). Parmi les 33393 personnes ayant répondu à une étude du Centre des migrations mixte (Mixed Migration Center, MMC, 2021), près de 28% ont déclaré que la pandémie avait rendu difficile le franchissement des frontières et 25% ont déclaré qu'elle avait affecté la mobilité interne. Les migrants internes s’étant retrouvés privés d’emploi et de logement à cause des confinements, des milliers de travailleurs du secteur informel ont quitté des villes telles que New Delhi pour rentrer dans leur ville d’origine (Nations Unies, 2020).
Ces exodes de travailleurs migrants – tant internes qu’internationaux – ont deux effets majeurs sur les pays et les lieux d’origine : une plus grande vulnérabilité en matière de santé (Zenner et Wickramage, 2020) et une pression socio-économique accrue. Outre les effets économiques directs de la perte des rapatriements de fonds (voir la partie ci-dessus), les études montrent que les rapatriements de fonds internationaux de migrants à leur famille réduisent le travail des enfants et maintiennent ces derniers à l’école (OIT-UNICEF, 2020). Avec la perte prévue de 109 milliards de dollars américains de rapatriements de fonds à cause de la COVID-19, davantage d’enfants risquent d’être victimes du travail des enfants.
D’après les données de l’OCDE (2020a) sur l’afflux de personnes migrant pour des raisons familiales au cours de l’année 2018, les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne et le Mexique ont accueilli près de 1,2 million de personnes appartenant à cette catégorie. Les États-‑Unis à eux seuls, ont hébergé plus de la moitié des migrants pour raisons familiales parmi ces sept pays de l’OCDE. Ces membres de la famille de migrants peuvent avoir besoin d’une attention particulière pour faire face au stress et à l’anxiété liés à la COVID-19, ainsi que pour communiquer dans des langues autres que la langue officielle du pays. De plus, les migrants en situation irrégulière et leur famille peuvent hésiter à faire appel aux services de santé par peur d’être expulsés ou séparés de leurs proches.
À l’échelle mondiale, on comptait plus de 5,3 millions d’étudiants internationaux dans l’enseignement supérieur en 2017, et 3,3 millions d’entre eux étudiaient en Amérique du Nord et en Europe (UNESCO, 2020). La Chine, l’Inde, l’Allemagne, la République de Corée et le Viet Nam étaient les cinq premiers pays d’origine des étudiants internationaux. Près d’un étudiant international sur quatre venait de trois pays seulement : la Chine, l’Inde et l’Allemagne. Les étudiants internationaux ont eux aussi été affectés par la fermeture des campus universitaires, de la perte des emplois d’étudiant et des restrictions à la mobilité imposées à la fois par les pays d’origine et de destination frappés par la COVID-19.
Selon les estimations, environ un migrant international sur cinq vivait dans seulement l’une des vingt villes suivantes – Beijing, Berlin, Bruxelles, Buenos Aires, Chicago, RAS de Hong Kong, Chine, Londres, Los Angeles, Madrid, Moscou, New York, Paris, Séoul, Shanghai, Singapour, Sydney, Tokyo, Toronto, Vienne et Washington DC (OIM, 2015). Dans 18 de ces villes, les migrants internationaux représentaient environ 20 % de la population totale (ibid.). Dans certaines villes, la part des personnes nées à l’étranger dans la population totale dépasse de loin la moyenne mondiale (environ 3,4 % en 2015) (OIM, 2015). Dubaï avait une population née à l’étranger proche de 83 %, Bruxelles de 62 %, Toronto de 46 %, New York de 37 % et Melbourne de 35 %, pour citer quelques exemples (ibid.).
Les inégalités de revenu et la marginalisation influent sur les schémas locaux de prévalence de la COVID-19. Par exemple, alors que des cas positifs ont été enregistrés dans toute la ville de New York, la plupart des cas confirmés se trouvaient dans les zones où le revenu médian était le plus bas, malgré la disponibilité limitée des tests au niveau local. Cette situation s’explique probablement par des facteurs structurels liés à des conditions de vie et de travail qui empêchent les personnes d’appliquer les mesures de prévention et d’atténuation de base. Plus de 35 % de la population de New York en 2018 était née à l’étranger et les données publiquement disponibles du Département de la santé et de l’hygiène mentale de la ville de New York démontrent que les migrants sont surreprésentés dans les dix quartiers de la ville les plus touchés par la COVID-19 sauf un (cas positifs pour 1000 résidents).
Migration forcée ou déplacements causés par les conflits et migration environnementale
La COVID-19 et les restrictions de mouvement mondiales y attribuées ont également affecté les personnes déplacées à travers les frontières et à l'intérieur du pays. À l'échelle mondiale, le nombre de nouvelles demandes d'asile déposées au premier semestre de 2020 était de 32% inférieur à celui de la même période en 2019 (OCDE et al., 2020). L'Union européenne a enregistré une baisse de 33% des demandes d'asile au cours des 10 premiers mois de 2020 par rapport à la même période en 2019 (Commission européenne, 2021).
Les réfugiés et les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays sont parmi les personnes les plus vulnérables, en particulier celles qui vivent dans des camps et autres sites surpeuplés. Les 20 pays comptant le plus grand nombre de cas confirmés de COVID-19 au 1er mars 2021 abritaient environ 7,2 millions de réfugiés, soit près de 36% des réfugiés dans le monde à la fin de 2019 (analyse du CMADM basée sur les documents OMS, 2021 ; HCR, 2020). De ces 20 pays, la Turquie, l’Allemagne, la République islamique d’Iran, la France, les Etats-Unis et l’Irak comptent parmi les 20 principaux pays qui accueillent des réfugiés d’après les données du HCR pour la fin 2019 (ibid.). De plus, les États-Unis d’Amérique, le Pérou, la Turquie, l’Allemagne, le Brésil, l'Afrique du Sud, l'Espagne et la France étaient les dix pays affichant le plus grand nombre de demandes d’asile en attente fin 2019 (ibid.). Au 5 février 2021, plus de 737 000 Vénézuéliens avaient des demandes d'asile en instance au Pérou, aux États-Unis, au Brésil, en Espagne, en Colombie, au Mexique et en Argentine (Réponse pour les Vénézuéliens, 2021). Selon les estimations, un total de 50,8 millions de personnes étaient déplacées à l’intérieur de leur propre pays fin 2019 – 45,7 millions à cause d’un conflit et 5,1 millions dans le contexte de catastrophes. Quelque 18,3 millions sur les 50,8 millions avaient moins de 15 ans et 3,7 millions plus de 60 ans, les deux groupes étant particulièrement vulnérables (IDMC, 2020).
Décès et disparitions de migrants
Malgré les contraintes de mobilité posées par la pandémie du COVID-19, les migrants continuent de s'embarquer dans des voyages clandestins, fuyant la violence et la pauvreté et cherchant à améliorer leur vie. Les réponses au COVID-19 ont augmenté les risques et l'incertitude de ces voyages, poussant les gens dans des situations plus périlleuses où l'aide humanitaire et le sauvetage peuvent ne pas être disponibles. Plus de 3700 personnes ont perdu la vie lors de la migration entre le 1 mars 2020 et le 28 février 2021, selon les données du Projet sur les migrants disparus (Missing Migrants Project) de l'OIM. Les milliers de décès liés aux cas de COVID-19 parmi les travailleurs migrants et les décès liés aux restrictions de mobilité et aux confinements ne sont pas inclus dans ce total.
La crise humanitaire impliquant les milliers de morts sur les routes de migration maritime vers l'Europe se poursuit malgré la pandémie de la COVID-19. Dans la période de mars 2020 à février 2021, au moins 2269 personnes ont perdu la vie dans la mer Méditerranée et l'océan Atlantique en tentant d'atteindre l'Italie, Malte, la Grèce, l'Espagne et les îles Canaries, plus que pendant la même période en 2019/2020 où au moins 2110 personnes ont perdu la vie. Il y a aussi une crise en cours de « d’é paves invisibles » - où un bateau est porté disparu mais aucun survivant n'est retrouvé et sont donc très difficiles à vérifier - sur les routes maritimes vers l'Europe, dont au moins 19 cas en 2020.
La Méditerranée centrale reste la route migratoire irrégulière la plus dangereuse au monde - 1053 personnes sont mortes sur cette route entre mars 2020 et février 2021. En cette période, au moins 59 134 personnes ont tenté de traverser par bateau l'Afrique du Nord vers l'Italie et Malte, 91% de plus qu'entre mars 2019 et février 2020 (30841). Les mesures politiques en réponse au COVID-19, telles que la fermeture des ports et la diminution des opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale, affectent la collecte de données exactes.
Entre septembre 2020 et janvier 2021, il y a eu une augmentation régulière des traversées de la route atlantique de l'Afrique de l'Ouest, de la côte du Sénégal, de la Mauritanie et du Royaume du Maroc aux îles Canaries espagnoles. Au moins 21167 personnes sont arrivées aux îles Canaries au cours de ces cinq mois seulment, contre 2456 au cours des même cinq mois de 2020. En février 2021, seulement 264 personnes sont arrivées dans les îles. Ces chiffres sont encore bien en deçà d'un pic en 2006, lorsque 32000 personnes sont arrivées dans les îles par bateau depuis la côte de l'Afrique. Cependant, le traumatisme et le risque de mort que représente cette dangereuse traversée sont préoccupantes. Entre mars 2020 et février 2021, MMP a enregistré le décès ou la disparition d'au moins 843 personnes sur la route de migration vers les îles Canaries. C'est beaucoup plus élevé que les 238 mortsenregistrés durant la période entre mars 2019 à février 2020.La situation est particulièrement préoccupante pendant la COVID-19 lorsque plus de soins sont nécessaires pour éviter le surpeuplement et pour assurer des conditions d'accueil sûres, et que les protocoles et réponses sanitaires sont appliqués à tous sans discrimination.
Pendant ce temps, les tentatives de passage (y compris les arrivées et les interceptions) en Grèce depuis la Turquie via la frontière terrestre et la route migratoire de la Méditerranée orientale ont diminué de 82% entre mars et décembre 2020 par rapport à la même période en 2019. Le verrouillage et les autres restrictions à la mobilité adoptées en La Turquie ainsi que les patrouilles accrues du côté grec expliquent probablement cette réduction des tentatives de franchissement. Malgré cette nette diminution des mouvements sur cette route de migration, les gens continuent de perdre la vie sur cette route - au moins 70 personnes seraient mortes entre mars 2020 à février 2021.Les restrictions de la COVID-19 en Asie du Sud-Est ont fait que des centaines de migrants rohingyas qui tentaient de quitter le Myanmar se sont retrouvés bloqués en mer, les États refusant de leur permettre de débarquer en raison de craintes d'infection. Bien qu'il soit difficile de connaître le véritable nombre de morts sur ces bateaux échoués, l'un de ces échouages a fait environ 70 morts en avril 2020 après que le bateau s'est vu refuser l'entrée dans un pays pendant plus de deux mois. Une autre situation similaire en février 2021a fait au moins 8 morts de migrants rohingyas et 1 disparu . Au cours de la crise de 2015 dans la baie du Bengale, qui a vu des bateaux rohingyas bloqués de la même manière, l'OIM a documenté plus de 500 décès en mer.
En fonction de l’âge
Les objectifs de développement durable des Nations Unies demandent de veiller à ne laisser personne de côté, y compris les migrants. Les différentes tranches d’âge se trouvent confrontées à des vulnérabilités différentes, à la fois en tant que migrants et parce qu’elles correspondent à une certaine période de la vie des personnes. Globalement, environ 12% de tous les migrants internationaux ont 65 ans et plus. Toutefois, dans 12 des 20 pays qui comptent le plus grand nombre de cas confirmés, les personnes de 65 ans et plus représentent une proportion inférieure de la population des migrants internationaux par rapport à celle de la population générale. L’Inde, le Brésil, le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne, l'Argentine, la Pologne et l'Ukraine sont les seuls pays à faire exception. Dans 15 des 20 pays qui enregistrent le nombre le plus élevé de cas confirmés, on estime qu’entre 61 % et 88 % des migrants sont en âge de travailler (entre 20 et 64 ans) (analyse du CMADM basée sur les documents OMS, 2021 ; DAES, 2020). Les migrants ont ainsi plus de chances d’être soit jeunes soit en âge de travailler, et font partie de la réponse à la pandémie en travaillant dans les secteurs essentiels. Ils risquent aussi d’être exposés à la COVID-19 en travaillant dans les secteurs où le télétravail n’est pas possible (voir la partie ci-dessus sur la migration de main d’œuvre pour une analyse détaillée).
Migrants dans les pays avec le plus grand nombre de cas cumulatifs de COVID-19, au 1er mars 2021
Pays |
Cas confirmés de COVID-19 pour 100 000 personnes de la population, au 4 mars 20211 |
Migrants en proportion de la population (%), mi-2019 |
Part des migrants en âge de travailler |
Part des personnes de 65 ans et plus dans la population de migrants (%), mi‑2019 |
Part des personnes de 65 ans et plus dans la population (%), mi-2019 |
États-Unis d'Amérique |
8 581.02 |
15.3 |
77.2 |
14.5 |
16.6 |
Inde |
808.47 |
0.4 |
70.7 |
21.6 |
18.7 |
Brésil |
5 008.92 |
0.5 |
59.3 |
15.7 |
6.3 |
Fédération Russe |
2 931.97 |
8.0 |
76.7 |
16.9 |
21.7 |
Royaume-Uni |
6 169.76 |
13.8 |
77.4 |
11.0 |
8.7 |
France |
5 694.92 |
13.1 |
67.6 |
22.6 |
9.0 |
Espagne |
6 694.90 |
14.6 |
80.7 |
9.0 |
11.4 |
Italie |
4 888.10 |
10.6 |
84.4 |
7.1 |
18.7 |
Turquie |
3 229.01 |
7.2 |
70.9 |
5.9 |
9.6 |
Allemagne |
2 936.16 |
18.8 |
70.2 |
21.4 |
20.1 |
Colombie |
4 440.78 |
3.7 |
57.6 |
2.6 |
6.6 |
Argentine |
4 705.15 |
5.0 |
68.4 |
14.2 |
5.5 |
Mexique |
1 626.58 |
0.9 |
34.8 |
4.5 |
23.3 |
Pologne |
4 585.37 |
2.2 |
36.9 |
40.8 |
20.8 |
Iran (République islamique d ') |
1 972.43 |
3.3 |
51.4 |
2.5 |
16.9 |
Afrique du Sud |
2 554.12 |
4.8 |
81.8 |
7.1 |
7.6 |
Ukraine |
3 120.48 |
11.4 |
72.9 |
20.3 |
9.1 |
Pérou |
494.96 |
3.7 |
61.4 |
2.9 |
20.0 |
Indonésie |
4 058.91 |
0.1 |
78.5 |
5.0 |
15.5 |
Tchéquie |
11 850.41 |
5.1 |
87.6 |
5.5 |
6.6 |
Moyenne globale |
|
3.6 |
73.2 |
12.2 |
9.3 |
Voir : OMS, 2021 (consulté le 4 mars 2021) ; analyse du CMADM fondée sur le document DAES, 2020 ;
1 Notez qu'il s'agit de taux de prévalence, qui sont basés sur le nombre total de tous les cas confirmés de la COVID-19 (y compris les cas nouveaux et préexistants). Ceux-ci ne doivent pas être confondus avec les taux d'incidence, qui sont basés sur le nombre de nouveaux cas de la COVID-19 au cours d'une période donnée.
En fonction du sexe
Les femmes représentaient moins de la moitié, 135 millions soit 48,1 %, de la population de migrants internationaux à l’échelle mondiale mi-2020 (DAES, 2020). Toutefois, les femmes sont plus nombreuses à migrer de manière indépendante pour trouver un emploi, à des fins d’éducation ou comme cheffe de famille. Malgré ces progrès, les femmes migrantes peuvent faire face à plus de discrimination et sont davantage exposées aux traitements abusifs que les hommes migrants. De manière générale, la pandémie a provoqué une augmentation de la violence basée sur le genre (CARE et IRC, 2020).
Mais les hommes sont eux aussi exposés à des vulnérabilités dans les processus migratoires. C’est pourquoi les données migratoires qui tiennent compte du sexe peuvent promouvoir une plus grande égalité et sont aussi essentielles pour éviter les répercussions excessives pour les groupes défavorisés. Les soins aux personnes reposent également de manière disproportionnée sur les femmes, y compris les soins aux personnes touchées par la COVID-19 et aux enfants, compte tenu de la fermeture des crèches et des écoles (ibid.). En tant que personnel soignant, les femmes migrantes peuvent être contraintes d’assumer une charge supplémentaire en plus de leur travail, car elles doivent s’occuper des membres de leur famille dans leur foyer, tout en risquant d’être stigmatisées si elles sont en contact avec des personnes infectées par la COVID-19.
La présence plus importante d’hommes dans la population de migrants internationaux se reflète aussi dans la proportion de travailleurs migrants de sexe masculin. En 2017, on estimait que 58,4 % des travailleurs migrants étaient des hommes et 41,6 % des femmes (OIT, 2018). Avec respectivement 63,5 % et 48,1 %, le taux de participation des femmes migrantes à la main-d’œuvre était supérieur à celui des femmes non migrantes en 2017 (ibid.). Dans la crise sanitaire mondiale actuelle, les travailleuses migrantes peuvent donc être plus touchées par le chômage que les ressortissantes des pays, et peuvent donc être victimes d’une double discrimination, à la fois comme migrantes et comme femmes, dans leur pays d’accueil.
Gouvernance des migrations
Accès aux soins de santé
Une analyse des évaluations établies sur la base des indicateurs de gouvernance des migrations (IGM) effectuée entre 2018 et 2020, avant la pandémie de la COVID-19, a révélé que les pays accordaient aux migrants divers niveaux d’accès aux services de santé publics en fonction de leur statut migratoire. L’analyse, qui portait sur 51 pays, a montré qu’un tiers de ces pays prévoyaient les mêmes conditions d’accès aux soins de santé pour les citoyens et les migrants, quel que soit leur statut migratoire. Dans la moitié des pays étudiés, l’égalité d’accès aux soins de santé dépend du statut migratoire. Par ailleurs, 12 % des pays n’accordent aux migrants l’accès qu’à certains services de santé, dont les soins de santé d’urgence (OIM, 2019 ; et Milan et Cunnoosamy, 2020). Dans la plupart des cas, l’accès aux soins de santé privés ou aux assurances ne fait l’objet d’aucune restriction.
L’analyse des données relatives à la migration issues de la douzième enquête des Nations Unies sur la population et le développement – autre initiative visant à recueillir des données sur l’indicateur 10.7.2 des ODD – révèle que l’accès des migrants aux services de santé peut dépendre du statut migratoire. L’Enquête, qui a collecté des données sur 111 pays entre fin 2018 et début 2019, a montré que plus de trois quarts (86 %) des gouvernements fournissaient des soins de santé essentiels et d’urgence à tous les non-nationaux, quel que soit leur statut migratoire, tandis que 8 % indiquaient n’accorder ces services qu’aux personnes en situation régulière.
Inclusion des migrants dans les plans de crise
Le coronavirus SARS-CoV-2 qui conduit à la COVID-19 touche toutes les personnes, quelle que soit leur nationalité. Mais les migrants, en raison de l’absence de données, ne sont souvent pas pris en compte dans les plans nationaux de lutte contre la pandémie. Un examen des plans de préparation à une pandémie de grippe dans 21 pays de la région Asie-Pacifique en 2016 a révélé que seuls trois pays (la Thaïlande, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et les Maldives) incluaient dûment les non-nationaux dans leur plan, au-delà des mesures de contrôle sanitaire à la frontière (18 pays sur 21, Wickramage et al., 2018). Le fait d’exclure les migrants des prestations ou des soins de santé dans les cadres politiques et juridiques nationaux peut accroître les risques de transmission, avoir des conséquences négatives, empêcher l’accès à une détection et à un traitement précoce, et nuire à la gestion de la santé publique (Zenner et Wickramage, 2020).
L’évaluation des indicateurs de gouvernances des migrations a révélé qu’un pays sur cinq a mis en place des mesures spécifiques pour aider les migrants pendant et après les crises. Ces mesures portent principalement sur le déplacement interne, les mouvements de réfugiés et la fourniture d’une assistance humanitaire dans les mêmes conditions pour les nationaux et les migrants. Les mesures sur le maintien ou le renforcement des systèmes de santé lors d’une crise sanitaire ne sont pas mentionnées de manière spécifique. Quelque 13 % des pays prévoient en partie de telles mesures en ce sens que leur stratégie inclut toutes les communautés vulnérables (englobant ainsi les migrants de manière informelle). Certains pays assouplissent temporairement les critères d’immigration, permettant aux migrants dont le pays d’origine a été frappé par une crise de rester dans leur pays de destination au-delà du délai habituel. Dans d’autres cas, l’assistance est fournie de fait à tous les migrants, quel que soit leur statut migratoire. Plus de la moitié des pays (55 %) ne prévoient pas de mesures spéciales pour aider les migrants, mais plusieurs mentionnent qu’une assistance leur est dispensée sur une base ad hoc.
Réciproquement, 69 % des pays offrent une assistance à leurs ressortissants se trouvant à l’étranger en période de crise. La plupart de ces pays délivrent des documents de voyage d’urgence et proposent des possibilités de rapatriement, mais uniquement pour les « crises humanitaires » au sens large. Le reste des pays (31 %) prodiguent une assistance au cas par cas et uniquement lorsque le pays d’origine des migrants a une représentation consulaire sur leur territoire. Le plus souvent, l’assistance du pays d’origine est limitée, voire impossible lorsqu’il n’existe pas de consulat dans le pays d’accueil.
Les migrants, y compris les étudiants internationaux ou les travailleurs migrants employés sur des bateaux de croisière, risquent de se retrouver bloqués si les règles de contrôle aux frontières sont modifiées à cause de la pandémie, ceux qui ne peuvent bénéficier d’une assistance consulaire étant les plus vulnérables.
Comme pour les évaluations établies sur la base des indicateurs de gouvernance des migrations, l’Enquête des Nations Unies a révélé que 68 % des gouvernements avaient pris des mesures spécifiques pour fournir une assistance à leurs ressortissants se trouvant à l’étranger dans des pays en situation de crise ou d’après-crise.
L'Irlande a mené une enquête politique rapide basée sur le module COVID-19 des IGM en mai 2020 pour évaluer dans quelle mesure les politiques de réponse à la COVID-19 - qu'il s'agisse de migrations, de réponse aux crises, de santé, de relèvement socio-économique ou d'autres politiques - reconnaissent et traitent les besoins spéciaux et vulnérabilités des migrants dans le pays ainsi que des ressortissants à l'étranger et promeuvent leurs contributions à la réponse au COVID-19 et à l'économie du pays. Parmi d’autres conclusions clés, le rapport met en évidence l'accès aux tests et aux traitements médicaux publics de la COVID-19 pour toutes les personnes résidant en Irlande, quel que soit leur statut migratoire.
Back to topPoints forts et limites des données
Pour des analyses détaillées des points forts et des limites des sources des données présentées, veuillez consulter les pages thématiques suivantes :
- Population de migrants internationaux et flux migratoires internationaux
- Migration et santé
- Migration de main-d’œuvre
- Rapatriements de fonds
- Migration familiale
- Étudiants internationaux
- Urbanisation
- Migration de retour
- Migration et déplacements forcés
- Migration environnementale
- Politiques migratoires et gouvernance des migrations
Pour une méthodologie détaillée sur le suivi des restrictions de mobilité de l’OIM, veuillez consulter le site https://migration.iom.int/
1 Les chiffres sur les nouveaux cas font face à des incohérences d'un pays à l'autre et peuvent sous-estimer l'étendue réelle des données sur les cas, car les chiffres officiels sont basés uniquement sur des cas testés et, par conséquent, les capacités à se tester et à se tester varient selon les pays. Il en va de même pour les décès enregistrés causés par le COVID-19 car différents critères de comptage des décès comme liés / basés sur le COVID-19 ou non sont utilisés dans différents pays.
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