Données migratoires en Afrique centrale
Les neuf pays qui composent l'Afrique centrale1- l'Angola, le Cameroun, la République centrafricaine, le Tchad, la République du Congo, la République démocratique du Congo, la Guinée équatoriale, le Gabon et Sao Tomé-et-Principe - ne forment pas traditionnellement une région hautement intégrée. La plupart de ces pays ont des liens plus étroits avec des pays en dehors de la région, en partie en raison de faibles niveaux de commerce intrarégional et de réseaux limités en termes d'infrastructures de transport, ce qui entraîne des taux de migration intrarégionale relativement faibles (Byiers, 2017, Bazonzi, 2014). Cependant, une grande majorité de migrants migrent à l’intérieur du continent africain – presque 75% de tous les migrants originaires d'Afrique centrale résidaient dans un autre pays africain à la mi-2020 (UN DESA, 2020). Les conflits récurrents et l'instabilité qui caractérisent la région entraînent également une migration forcée conséquente. Ainsi, en 2020, presque 39% de tous les migrants de la région étaient des réfugiés et des demandeurs d'asile (UN DESA, 2020). Malgré l'existence d’accords de libre circulation dans la région depuis 1983, des obstacles importants continuent d'entraver une coopération accrue en matière de politique migratoire.
COVID-19
La mobilité en Afrique centrale a été grandement affectée par le COVID-19. Tous les pays de la région ont fermé leurs frontières et certains ont restreint les mouvements internes. En novembre 2020, les frontières aériennes avaient pour la plupart rouvert, mais de nombreuses frontières terrestres restaient fermées. L'Angola et le Cameroun continuent d'imposer des restrictions d'entrée à la plupart des ressortissants étrangers, le Gabon limite l'entrée aux citoyens de l'Union européenne sur la base du principe de réciprocité, et les autres pays de la sous-région exigent des certificats médicaux présentant un résultat négatif au COVID-19 ou un dépistage à l’arrivée (OIM, 2020a). En mars 2021, un an après le premier cas de COVID-19 dans la région, les points d'entrée (PED) partiellement ouverts et totalement ouverts représentaient 54 % (contre 37 % en juin 2020). Les frontières aériennes et terrestres ont largement rouvert. Le Cameroun, le Gabon et la République du Congo continuent d'imposer des restrictions d'entrée à la plupart des ressortissants étrangers. De nombreux autres pays de la sous-région exigent des certificats médicaux ou un dépistage. Le COVID-19 a également eu un impact sur les activités de recensement, dans les trois pays où des recensements devaient avoir lieu en 2020 : le Cameroun, la République du Congo et la République démocratique du Congo.
PAYS HÔTES
Environ 3,9 millions de migrants internationaux résidaient en Afrique centrale au milieu de l'année 2020, soit 2,2% de la population totale. En chiffres absolus, la République démocratique du Congo (952,871) et l'Angola (656,434) accueillaient les populations migrantes les plus importantes, tandis que le Gabon (18,7%) et la Guinée équatoriale (16,4%), pays disposant d'importantes réserves de ressources naturelles, accueillaient le plus grand nombre de migrants en proportion de leurs populations respectives (UN DESA, 2020).
PAYS DE DESTINATION
Presque 75% des migrants d'Afrique centrale se déplacent vers d'autres pays africains, seuls 36% de tous les migrants d'Afrique centrale restent dans la sous-région. Au milieu de l'année 2020, 28% vivaient en Afrique de l'Est et 20% en Europe. Bien que la part des migrants en Europe n'ait pas changé de manière significative ces dernières années, la migration vers l'Amérique du Nord a considérablement augmenté, passant de moins de 1% en 1990 à près de 4% en 2020 (UN DESA, 2020).
DÉPLACEMENTS FORCÉS
L'Afrique centrale est à la fois région d’origine et région d’accueil pour un grand nombre de réfugiés et de demandeurs d'asile. Selon les estimations, plus de 1,5 million de réfugiés se trouvaient dans la sous-région au milieu de l'année 2020, soit 39% de tous les migrants de la région (UN DESA, 2020). 93% de ces réfugiés et de ces demandeurs d’asile étaient hébergés dans trois pays: la République démocratique du Congo, le Tchad et le Cameroun. Plus de 90% des 1,5 million de réfugiés originaires d'Afrique centrale venaient de la République démocratique du Congo ou de la République centrafricaine, qui figuraient tous deux parmi les 10 principaux pays d'origine des réfugiés dans le monde (HCR, 2020).
L'Afrique centrale comptait également, à la fin de 2020, deux des 15 pays accueillant le plus grand nombre de personnes déplacées internes (PDI). Au 31 décembre 2020, la République démocratique du Congo enregistrait presque à elle seule plus de 5,3 millions de personnes déplacées internes en raison des conflits et de l’insécurité accablant le pays, derrière seulement la République arabe syrienne (6,5 millions) (IDMC, 2021). En octobre 2020, plus d'un million de personnes étaient déplacées à l'intérieur du Cameroun en raison des crises dans la région du bassin du lac Tchad et dans les régions Nord-Ouest et Sud-Ouest, tandis que le Tchad accueillait 294 671 personnes étaient déplacées à l'intérieur du pays (IOM, 2020b; OCHA, 2020).
MIGRATION INTERNE
Beaucoup plus de personnes migrent au sein d’un même pays qu'à l'étranger, une tendance expliquée en grande partie par les mouvements d’exode rural, qui poussent les migrants des zones rurales vers les centres urbains. Les taux d'urbanisation en Afrique centrale sont, depuis l'ère coloniale, plus élevés que dans la plupart des autres régions de l'Afrique subsaharienne, et ils et ont continué de croître, atteignant 50% en 2018, contre 28% en Afrique de l'Est et 46% en Afrique de l'Ouest (UN DESA, 2018).
TRANSFERTS DE FONDS
Les envois de fonds représentent une très petite part du PIB des le plus pays d'Afrique centrale pour lesquels des données sont disponibles. Cependant, en termes absolus, la République démocratique du Congo est le premier bénéficiaire des transferts de fonds dans la sous-région et figure parmi les cinq premiers bénéficiaires en Afrique subsaharienne. Il a reçu environ 84% des 2,3 milliards de dollars américains enregistrés pour la sous-région en 2020, ce qui représente 3,9% de son PIB. Les estimations pour 2020, disponibles en mai 2021, montrent que les transferts de fonds vers la sous-région ont chuté de près de 6,6 % par rapport à 2019 (Banque Mondiale, 2021).
EXPULSION DE MIGRANTS
Les expulsions forcées de migrants continuent dans la sous-région, notamment en Angola. Plus de 400 000 migrants originaires de la République démocratique du Congo ont été expulsés de force ou ont fui l'Angola en octobre 2018 (Human Rights Watch, 2018). Depuis 2020, près de 13 000 Congolais sont revenus d'Angola dans la province du Kasaï-Central (OIM, 2021) et plus de 21 000 avaient été expulsés dans la province du Kasaï (ECHO, 2020).
Tendances passées (et présentes) de la migration
Des débuts de l’Histoire à la période coloniale
À partir du 3e millénaire avant notre ère, des populations et groupes de langue bantoue du Cameroun et du Nigeria actuels ont migré vers le sud et l'est pour finalement s'installer dans une grande partie de la moitié sud de l'Afrique, y compris la majeure partie de l'Afrique centrale (Ehret, 2015).
Les commerçants portugais ont atteint l'Afrique centrale pour la première fois au XVe siècle, établissant des comptoirs le long de la côte ouest et lançant la traite transatlantique des esclaves. Des millions de personnes transportées de force vers les Amériques entre le XVIe et le XIXe siècle, plus de la moitié sont parties de ports situés en Afrique centrale, dont près de 3 millions de personnes du seul port de Luanda, en Angola (Lovejoy, 2011).
La migration dans la région s'est accélérée au cours des périodes coloniales plus récentes, pendant lesquelles l’établissement de nouvelles colonies et l'expansion urbaine ont entraîné une demande croissante pour des travailleurs volontaires et forcés (Lututala, 2007; Flahaux et Schoumaker, 2016). Bien que la plupart des travailleurs migrants étaient originaires de zones voisines, la faible densité de population dans la région et les coûts de main-d'œuvre élevés signifiaient que les migrants étaient parfois recrutés de zones plus éloignées (Lututala, 2007). Le long des zones côtières du golfe de Guinée, les travailleurs migrants étaient recrutés en Afrique de l'Ouest selon des schémas de mobilité établis avant la période coloniale (Bazonzi, 2014). Au Congo belge (République démocratique du Congo actuelle), la migration était gérée par les autorités étatiques, qui ont fait venir des milliers de travailleurs du Rwanda et du Burundi pour travailler dans des sociétés minières coloniales, des plantations et des industries (Bazonzi, 2014).
Période postindépendances
Un nombre croissant de migrants européens se sont installés en Afrique centrale après la Seconde Guerre mondiale, en particulier au Congo belge et en Angola, mais la plupart ont quitté la région après que ces pays aient accédé à l'indépendance (Flahaux et Schoumaker, 2016). Dans le même temps, la migration de main-d'œuvre à destination de la région s'est poursuivie. À partir des années 1950, la production de pétrole dans les pays situés le long du golfe de Guinée, ainsi que la montée des exportations de ressources en République démocratique du Congo, ont contribué à une forte croissance économique et un afflux important de migrants (OCDE, 2004) ; par ailleurs, le Gabon et la Guinée équatoriale ont adopté des politiques pour encourager la migration de main-d'œuvre (Bazonzi, 2014). Cependant, l’effondrement des prix des matières premières dans les années 1980 a entraîné une importante contraction économique. En 1986, le Gabon a mis fin à ses politiques de recrutement de main-d'œuvre et favorisé une «gabonisation» de l'emploi. Les migrants ont en outre fait l’objet de violences xénophobes et été expulsés de plusieurs pays de la région au cours des années 1980 et 1990 (Lututala, 2007).
Pendant cette même période, les conflits armés et les guerres civiles ont également provoqué d'importants déplacements forcés en Afrique centrale. La guerre d'indépendance de l'Angola (1960-1974) et la guerre civile qui l’a directement suivie et qui s’étira pendant près de trente ans, ont entraîné le déplacement interne de plus de quatre millions de personnes et de près de 500 000 réfugiés, ayant pour la plupart trouvé refuge en République démocratique du Congo (Council on Foreign Relations, 2002). Un grand nombre de réfugiés ont également quitté le Tchad pour les pays limitrophes en raison de la guerre civile qui a sévi dans le pays dans les années 1980 (HCR, 2020).
La République démocratique du Congo (connue sous le nom de Zaïre entre 1971 et 1997) a connu des conflits et des déplacements à grande échelle à répétition depuis son indépendance. Des tentatives sécessionnistes successives dans les régions du sud, riches en ressources naturelles, ont provoqué des déplacements massifs de populations à partir des années 1960, tandis que des conflits ethniques entre communautés agraires et migrants rwandais, qui avaient immigré lors de plusieurs vagues successives depuis les années 1880, ont éclaté à plusieurs reprises dans l'est du pays (Lututala, 2007; Flahaux et Schoumaker, 2016). En 1994, plus de 1,2 million de réfugiés rwandais, fuyant à la fois le génocide et les représailles du Front patriotique rwandais après le génocide, ont fui dans l'est du Zaïre (Murison, 2002). Lorsque le Rwanda a envahi le pays en 1996 pour vaincre les groupes rebelles opérant depuis le Zaïre, des factions zaïroises opposées ont rejoint les combats, déclenchant la Première guerre du Congo (Flahaux et Schoumaker, 2016). La Deuxième guerre du Congo, de 1998 à 2003, a entraîné le déplacement de plus de 400 000 réfugiés congolais dans les pays avoisinants et de millions de personnes déplacées internes, ainsi que le retour de centaines de milliers de réfugiés rwandais (HCR, 2007).
Temps présent
Les taux de migration et les destinations des migrants d'Afrique centrale sont restés largement stables ces dernières années. La part des migrants d'Afrique centrale qui restent dans la sous-région (35%), est inférieure à celle qui reste dans d'autres sous-régions africaines, à l'exception de l'Afrique du Nord. La plupart des migrants originaires de la République démocratique du Congo, du Tchad et de la République centrafricaine se rendent dans les pays voisins, tandis que les anciennes puissances coloniales figurent parmi les deux principales destinations des migrants originaires de l'Angola, du Cameroun, de la République du Congo, de la Guinée équatoriale, du Gabon et de Sao Tomé et Principe. La migration vers l'Afrique du Sud depuis l'Angola, de la République du Congo et de la République démocratique du Congo a également crû au cours des dernières décennies (UN DESA, 2020).
Les principaux pays de provenance des migrants étrangers résidant dans les pays d’Afrique centrale dépendent fortement des situations de conflit et des niveaux de violence. À la mi-2020, le plus grand nombre de migrants dans la sous-région venait de République centrafricaine (20%), du Soudan (10%), de République démocratique du Congo (8%), du Rwanda (7%), de l'Angola (6 %) et du Nigeria (5%), et ces migrants se sont principalement installés dans les pays voisins. Ces pays dominent la liste des principaux pays d'origine en Afrique centrale depuis des décennies, le classement variant en fonction des tendances de déplacement forcés (Ibid.).
Migrations forcées : Parmi les pays de la sous-région, le Cameroun, le Tchad, la République démocratique du Congo et la République centrafricaine comptabilisent le plus de personnes déplacées:
- Cameroun : de multiples crises ont contribué à des mouvements importants de déplacement forcé au Cameroun ces dernières années. Des attaques répétées de Boko Haram et les changements climatiques ont entraîné des déplacements à grande échelle dans l’Extrême-Nord, avec plus de 321 000 PDI et 114 000 réfugiés nigérians enregistrés en octobre 2020 (OIM, 2020b). Le conflit entre groupes armés non étatiques et forces armées dans les régions anglophones du Nord-Ouest et Sud-Ouest a conduit au déplacement interne de 705 800 personnes et contraint 60 900 réfugiés camerounais à se réfugier au Nigéria (OCHA, 2020). Près de 293 000 réfugiés centrafricains résidaient également au Cameroun à la fin 2019 (HCR, 2020).
- République démocratique du Congo : près de 2,2 million de personnes ont été nouvellement déplacées en République démocratique du Congo en 2020 en raison du conflit armé et des combats intercommunautaires dans l’est du pays, et 279 000 personnes ont été déplacées suite à des catastrophes naturelles (IDMC, 2021). En outre, 800 000 congolais sont des réfugiés, la majorité dans un pays voisin (HCR, 2020).
- République centrafricaine : un quart de la population a été déplacé interne depuis l'escalade du conflit en 2013. Les déplacements forcés se poursuivent, le nombre de réfugiés ayant atteint plus de 600 000 personnes et le nombre de personnes nouvellement déplacées à l'intérieur du pays estimé à près de 100 000 personnes (IDMC, 2020; HCR, 2020; NRC, 2020).
- Tchad : 294 671 personnes étaient déplacées internes au Tchad en octobre 2020 en raison de la crise dans le Bassin du lac Tchad (OIM, 2020b). Plus de 442 000 réfugiés vivaient également au Tchad à la fin de 2019, dont 97% provenaient du Soudan ou de République centrafricaine (HCR, 2020).
Sources de données
Aucune source de données sur la migration ne se focalise uniquement sur l'Afrique centrale. Les sources de données comparables les plus courantes proviennent des organisations internationales. Cependant, les données ne sont pas toujours disponibles pour tous les pays de la sous-région.
Sources de données régionales et internationales
- Le Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies (UN DESA) produit des estimations régulières de la population de migrants internationaux ventilées par âge, sexe, origine et destination.
- L'OIM recueille diverses données sur les populations migrantes et les personnes déplacées internes, par le biais de la Matrice de suivi des déplacements (DTM), y compris des informations sur les nombres, les flux, la localisation, les profils, les vulnérabilités et les conditions de vie des populations cibles. Certains ensembles de données sont présentés sous forme de bases de données brut, tandis que d'autres données sont fournies via des tableaux de bord et des rapports. La DTM opère actuellement au Cameroun, en République centrafricaine, au Tchad et en République démocratique du Congo. L'OIM publie également des rapports réguliers contenant des données sur les migrants assistés par ses programmes d'aide au retour volontaire et à la réintégration (AVRR), y compris des informations sur les pays d'accueil et d'origine, le sexe, l'âge et les vulnérabilités.
- Le portail de données de l’Organisation internationale du travail (OIT), ILOSTAT, comprend plusieurs indicateurs nationaux sur les migrations de main-d’œuvre et les accidents du travail ventilés par statut migratoire.
- Le HCR gère une base de données statistiques sur les populations de réfugiés dans le monde, qui comprend des données sur les réfugiés, les demandeurs d'asile, les PDI et autres populations relevant de la compétence du HCR, par pays d'origine et pays d’accueil. Des tableaux de bord dédiés pour certains pays d'Afrique centrale sont disponibles sur le portail des opérations du HCR.
- L'Observatoire des situations de déplacement interne (IDMC) publie des données sur les stocks de personnes déplacées internes (PDI) et les nouveaux déplacements dus aux conflits et aux catastrophes dans sa base de données sur les déplacements internes.
- Le Counter Trafficking Data Collaborative (CTDC) publie des données anonymisées sur les cas identifiés de traite des êtres humains fournies par des organisations de lutte contre la traite.
- La Banque mondiale produit des données sur les transferts de fonds (entrées et sorties).
- Afro baromètre a publié des données sur les plans d'émigration et les motifs de migration au Cameroun, au Gabon et à Sao Tomé et Principe à partir d’enquêtes menées dans ces trois pays entre 2016 et 2018.
- L'Union africaine a publié deux rapports sur les statistiques relatives à la migration de travail en Afrique, avec des estimations sur le nombre de travailleurs migrants présents dans la Communauté économique des États de l'Afrique Centrale (CEEAC).
Données tirées des recensements et des enquêtes ménages
- Recensements de la population et des logements: Seuls six des neuf pays d'Afrique centrale ont effectué des recensements lors du cycle de recensement de 2010. Les questionnaires utilisés pour les recensements sont disponibles auprès de la Division de la statistique des Nations Unies (ONU DAES). Les rapports et certaines données, y compris des informations sur les migrations, sont disponibles auprès des bureaux nationaux de statistique.
- Enquêtes sur la population active: Sur la base des données fournies par l'OIT, moins de la moitié des pays d'Afrique centrale ont réalisé des enquêtes sur la population active. L’OIT fournit une liste de questionnaires et de rapports par pays.
- Enquêtes démographiques et sanitaires (EDS): Tous les pays d'Afrique centrale ont mené des enquêtes EDS, la plupart au cours des dix dernières années. Les bases de données et les rapports sont disponibles en ligne, bien que les informations sur la migration soient limitées.
Autres sources de données et d'analyses
- OCHA gère le Humanitarian Data Exchange (HDX), une plateforme de données pour le partage de données humanitaires. De nombreuses organisations intergouvernementales, institutions gouvernementales et organisations de la société civile travaillant en Afrique centrale publient des ensembles de données sur cette plateforme.
- REACH publie des données et des analyses détaillées dans les zones de crise via son centre de ressources. L’organisation est actuellement présente en République centrafricaine et en République démocratique du Congo et a dans la passé travaillé au Tchad, au Cameroun et en République du Congo.
- ACAPS produit des rapports et analyses basés sur des données sur les questions humanitaires au Tchad, au Cameroun, en République du Congo, en République centrafricaine et en République démocratique du Congo.
Obtenir des données fiables au niveau régional sur les migrations en Afrique centrale est très difficile. La plupart des données à l’échelle nationale proviennent de recensements et d'enquêtes ménages; cependant, trois des neuf pays de la région n'ont pas effectué de recensement en 2010 et la République démocratique du Congo n'a pas complété de recensement national depuis 1984. Peu d'enquêtes au niveau national sont menées au niveau national. Si tous les pays de la région ont réalisé des enquêtes EDS, celles-ci fournissent peu ou prou d'informations sur les migrations, et des enquêtes sur la main-d'œuvre ont été menées dans moins de la moitié des pays d'Afrique centrale. Les enquêtes nationales spécialisées sur la migration sont quasiment inexistantes dans la région et, dans la pratique, la plupart des données sur la migration proviennent d'enquêtes locales à petite échelle qui ne sont pas représentatives (Ngoie Tshibambe, 2014a). Les données administratives sont recueillies par la police et les autorités frontalières, mais sont difficiles d'accès pour les chercheurs et ne sont pas conçues à des fins statistiques (Ibid.).
Aucune structure régionale n'est chargée de collecter des données sur les migrations ou de promouvoir l'harmonisation des données entre les pays d'Afrique centrale, limitant la qualité et la comparabilité des données sur les migrations (Lututala, 2007; Ngoie Tshibambe, 2014a). Les données existantes sont fragmentées, se fondent sur des périodes de référence différentes et manquent de définitions harmonisées (Ngoie Tshibambe, 2014a).
Les estimations d’ONU DAES sont la source la plus couramment utilisée de données comparables sur les migrations en Afrique centrale, mais comme il s'agit de projections basées sur des données de recensement, elles manquent de fiabilité en raison des limites des données de recensement existantes. Les données d’ONU DAES sous-estiment probablement la migration pour les pays d'Afrique centrale, en particulier la migration intrarégionale, en partie en raison du grand nombre de migrants irréguliers qui sont plus difficiles à saisir lors de collectes de données (Fomekong, 2014; Ngoie Tshibambe, 2014a). D'autres sources internationales manquent de données pour certains pays de la sous-région. Par exemple, aucune donnée sur les transferts de fonds n'est disponible auprès de la Banque mondiale pour le Tchad, la République centrafricaine, la République du Congo ou la Guinée équatoriale et les données disponibles sous-estiment probablement les envois de fonds car elles n'incluent pas les flux de petits montants ou les flux informels (Global Migration Group, 2017).
La Matrice de suivi des déplacements (DTM) de l'OIM fournit des informations actualisées et plus détaillées sur les populations mobiles dans les pays où elle est présente, sur des sujets tels que les flux migratoires, la migration irrégulière et les expériences et besoins des personnes déplacées de force dans la région. Cependant, ces données ne sont disponibles que pour certaines zones géographiques et ne sont pas représentatives (Fargues, 2020b).
La coopération en matière de migration en Afrique centrale est entravée par une intégration régionale relativement faible. Les barrières géographiques et l’insuffisance des infrastructures de transport restreignent la mobilité intrarégionale (Urso et Hakami, 2018). Les flux commerciaux intrarégional sont parmi les plus faibles d'Afrique, et la mise en œuvre des accords régionaux sur le libre-échange et l’instauration de droits de douane communs est lente (Byiers, 2017). De nombreux pays ont des liens économiques et historiques plus forts avec des pays extérieurs à la sous-région et manifestent un intérêt limité pour la poursuite d'initiatives régionales communes (Byiers, 2017; Urso et Hakami, 2018). En outre, la plupart des pays sont membres de plusieurs organes régionaux qui se chevauchent, ce qui entraîne une confusion dans les priorités et les obligations (MacAulay et Karbo, 2008).
Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC): la CEEAC comprend les neuf pays de la région de l'Afrique centrale, plus le Burundi et le Rwanda. Créée officiellement en 1983, la CEEAC est devenue l'une des Communautés économiques régionales (CER) reconnues par l'Union africaine en 1999 et, à ce titre, a pour mandat de promouvoir l'intégration régionale et la liberté de circulation en Afrique centrale (Abebe, 2017).
Le traité fondateur de la CEEAC de 1983 comprend des engagements visant à faciliter la libre circulation des citoyens des États membres au sein de la CEEAC. Un protocole relatif à la libre circulation et au droit d'établissement des ressortissants des États membres a également été inclus dans l'annexe VII du traité, énumérant les droits à la libre circulation, au séjour et à l'établissement, qui devaient être appliqués dans les 4 à 12 ans suivant l'entrée en vigueur du protocole (Ngoie Tshibambe, 2014b).
Le protocole a été renforcé par des décisions et politiques ultérieures de la CEEAC, dont aucune n'a été pleinement mise en œuvre :
- La décision n°03/CCEG/VI/90 (1990) appelait à une entrée sans visa de 90 jours pour certaines catégories de personnes, notamment les touristes, les professionnels et les étudiants (Ngoie Tshibambe, 2014b).
- La Convention sur la coopération et l'entraide judiciaire (2006) définit un cadre juridique pour faciliter la mise en œuvre du Protocole sur la liberté de circulation (Fomekong, 2014).
- Une politique migratoire régionale a été rédigée en 2013 mais n'a pas été mise en (Union africaine, 2016).
Bien que ces instruments formels existent pour promouvoir la liberté de mouvement et une politique migratoire harmonisée, peu de mesures concrètes ont été prises pour les mettre en œuvre, les dirigeants le justifiant en exprimant des préoccupations concernant la sécurité et les travailleurs étrangers (Ngoie Tshibambe, 2014b; Fomekong, 2014). Les pays n'ont pas répondu aux appels visant à établir des couloirs d'entrée dédiés aux ressortissants des pays membres de la CEEAC dans les aéroports et aux postes frontières. Les politiques d'entrée, de séjour et d'établissement varient d'un État membre à l'autre et aucun membre de la CEEAC n'accorde une entrée sans visa à tous les citoyens de la CEEAC (Ngoie Tshibambe, 2014b). La réciprocité des politiques de visas s'est améliorée, passant de 11% en 2017 à 29% en 2019. Cependant, le taux de réciprocité est le deuxième plus bas parmi toutes les CER en Afrique (BAD, 2019) et concerne principalement la politique de visa réciproque entre les membres de la CEMAC (voir ci-dessous).
Dans les pays qui ont mis en œuvre l'entrée sans visa, des difficultés pratiques entravent sa mise en œuvre, notamment des obstacles administratifs, les pots-de-vin requis aux points de contrôle frontaliers et le fait que les migrants potentiels n’ont fréquemment pas de documents de voyage officiels (Ngoie Tshibambe, 2014b).
Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC): Six États membres de la CEEAC sont également membres de la CEMAC, établie en 1994 pour gérer la monnaie commune des pays et promouvoir le libre-échange intrarégional – le Cameroun, la République centrafricaine, le Tchad, la République du Congo, la Guinée équatoriale et le Gabon.. Le Traité de la CEMAC, ratifié en 1999, prévoit également l'entrée, le séjour et l'établissement gratuits pour tous les citoyens des pays de la CEMAC (CEMAC, 1994). Afin de rendre opérationnelles ces dispositions, les États membres ont signé un accord sur la libre circulation en 2013, qui est entré en vigueur après sa ratification en 2017 (EIU, 2017).
Bien que l'entrée sans visa soit techniquement en vigueur, peu de citoyens ont actuellement accès aux documents d'identification biométriques requis, ce qui limite l'impact des dispositions sur la libre circulation (Ibid.).
Union africaine : la mise en œuvre des engagements de l'Union africaine en matière de libre circulation reste lente. Le protocole de 2018 relatif à la libre circulation des personnes, au droit de séjour et au droit d’établissement en Afrique, qui comprend des engagements contraignants sur la liberté d'entrée, de séjour et d'établissement, n'a été ratifié que par 4 des 55 États membres à la fin 2020. Alors que tous les pays d'Afrique centrale, à l'exception du Cameroun, l'ont signé, seul Sao Tomé et Principe a ratifié le Protocole (UA, 2019).
Dialogues régionaux sur la migration :
- Le Dialogue sur la migration pour les États de l'Afrique centrale (MIDCAS) a été formé en 2012 pour faciliter la coopération en matière de migration dans la région de la CEEAC. Le MIDCAS est actuellement inactif.
Ndione, B. (Ed.), 2014. L'Afrique centrale face aux défis migratoires. Migration ACP.
Lututala, B.M., 2007. Les migrations en Afrique Centrale : Caractéristiques, enjeux et rôles dans l’intégration et le développement des pays de la région. Institut des migrations internationales.
Flahaux, M. et B. Schoumaker, B., 2016. Democratic Republic of the Congo: A Migration History Marked by Crises and Restrictions. Institut des politiques de migration.
Urso, G. et A. Hakami, A., 2018. Regional Migration Governance in Africa: AU and RECs. Centre commun de recherche de la Commission européenne.
Lelu, D., 2013. Amélioration des données sur les migrations dans la République Démocratique du Congo: Évaluation et recommandations. ACP Observatory on Migration.
1 Telle que définie par la Division de la Statistique des Nations Unies.
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